Depuis longtemps, les membres du CSSP49 dénonce l'inertie des pouvoirs publics locaux à propos de l'hébergement d'urgence. Celui concerne à la fois des demandeurs d'asile, des migrants mais aussi des rroms, des jeunes en errance...
L'année dernière, un solution avait semble-t-il été trouvée avec la mise en place des hébergements à Rouchy.
Ci-dessous, un témoignage sur la vie quotidienne au sein de la Halte de Nuit de Rouchy.
Consternant !
Lettre
de justification de fin de travail
en tant que travailleur social sur
la Halte de Nuit « Rouchy »
Par
la présente je souhaite expliquer les raisons qui m’amènent à
prendre la décision de ne plus vouloir intervenir sur cette halte de
nuit. Il me faut préciser qu’il ne s’agit en aucun cas d’une
contestation des décisions et orientations qui sont prises quant au
fonctionnement de Rouchy mais plutôt d’un désaccord personnel et
éthique. En effet, loin de m’engager sur le terrain politique de
l’intérêt ou non d’un tel site, je souhaite simplement
expliquer mon choix et mettre en avant les modalités d’accueil
réservées aux usagers hébergés à Rouchy et avec lesquels je suis
en désaccord. Il me semble de plus nécessaire également de bien
préciser que ce ne sont pas non plus les contraintes horaires liées
à ce poste qui me poussent à arrêter mes interventions. Il me faut
alors aborder les principaux points avec lesquels je suis en
désaccord et cela en plusieurs points.
Sur les modalités
d’accueil :
Les
personnes accueillies à Rouchy ont des profils très variés. Elles
sont cependant comme point commun de ne pas avoir de solution
d’hébergement pour la nuit à venir. Ces personnes doivent donc
appeler le service du 115 pour demander au quotidien une place pour
une nuit d’hébergement. Ce dernier, selon quelques critères qui
lui sont dictés, attribue alors 61 places chaque jour à partir de
8h30. Nous accueillons alors ces 61 personnes orientées chaque soir
à partir de 21h00 :
Sur un premier site,
40 personnes sont des familles aux compositions variées -couple+
enfant(s), femme + enfant(s), homme + enfant(s),…- les amplitudes
d’âge s’étendent alors de quelques jours à plus de 60 ans.
Ces personnes sont réparties sur deux algécos (sortes de
préfabriqués sommaires) composés de 4 chambres chacun.
Sur un second site
séparé du premier par un grillage, 15 places sont réservées aux
hommes isolés au sein d’un algéco. Cet espace permet un accueil
de chiens qui peuvent être mis en cage pendant la nuit. 6 Mineurs
Isolés Etrangers, prennent place également au sein d’un second
algéco. Aucune place femme n’y est prévue.
Avec
cette hétérogénéité de publics, un accueil adapté et
individualisé semble, si ce n’est impossible, à tout le moins
complexe. L’essentiel y est cependant assuré par la mise à l’abri
des personnes. Cependant au-delà cette mise à l’abri, les
conditions d’accueil matérielles sont à mon sens d’une
indigence inappropriée. Dans les algécos, ne sont présents que des
lits de camp picots. Ces espaces pour le sommeil jouxtent deux petits
blocs sanitaires répartis de part et d’autre du grillage. Ainsi
nous retrouvons sur le site un total de 3 douches (dont une
inaccessible), de 4 toilettes à « la turque » et d’un
W-C classique (également inaccessible aux usagers), de 4 urinoirs,
de 2 lavabos et de 2 chauffe-eau de 150/200 litres.
Sur les conditions
d’hygiène
Il
est à noter que ces ballons d’eau chaude ne fonctionnent pas
depuis mon arrivée sur le site en novembre 2013, et que la remise en
fonctionnement de ces-dits ballons ne se fera, selon les propos
officiels, pas « immédiatement ». Sur ce point, il m’est
difficilement acceptable de cautionner un accueil si peu qualitatif
et qui n’engendrerait pourtant, à mon sens, que peu de frais pour
des effets non anodins. Se pose également à travers ce manque, la
question de l’hygiène des nourrissons et jeunes enfants mais
également de toutes personne présente sur le site et notamment les
exclus sans-abri qui posent parfois quelques désagrément dans
l’espace collectif. Je m’interroge également sur les situations
récurrentes des personnes que nous sommes dans l’obligation
d’orienter vers le CHU étant donné leur état de santé. Celui-ci
n’est-il pas lié à minima, aux conditions de manque d’hygiène
vécues sur le site.
Dans
le même sens de prévention à la santé, l’accueil de personnes
ayant fait l’expérience de la rue(migrants ou non) justifierait le
nettoyage régulier des lits « picots », ce que je n’ai
jusqu’à présent pas eu l’occasion de constater en 4 mois. La
question du confort n’est pas soulevée ici, mais celle de
l’hygiène me parait cependant primordiale mais semble être mise
de côté pour de publics en proie à diverses contagions.
Je
n’évoque pas des questions qui resteront probablement sans
réponses comme le manque d’abri, l’absence de la moindre
installation au profit des bébés… En abordant quelques questions
physiques et matérielles d’un tel site et sans soulever la moindre
notion de confort, simplement d’hygiène, il m’apparait –une
nouvelle fois personnellement-inacceptable d’accueillir des usagers
déjà en souffrance dans ces conditions. L’accueil du public, des
plus jeunes aux plus démunis, ne se fait alors, à mon sens, pas de
façon digne et respectueuse.
Au-delà
de ces modalités physiques et matérielles d’accueil, il m’est
nécessaire d’aborder les principes d’attribution des places et
le fonctionnement en vigueur à Rouchy.
Sur le fonctionnement
à Rouchy :
N’ayant
que peu en tête les origines et les enjeux d’un tel projet de
halte de nuit, je pense pouvoir intégrer certaines volontés de
quantifier voire de « quota-ifier »les attributions des
places par le 115. Je suis cependant perplexe quant à certaines
positions et décisions sur ces attributions et ceci principalement
sur la question de l’accès des femmes à Rouchy. Celui-ci ne peut
se faire qu’à partir de 22h00. A l’approche d’élections
défendant des principes de parité, qu’en est-il de celle de
l’accès au site pour une femme isolée (française ou Demandeuse
d’Asile). N’ayant pas de place attribuable et prévue pour les
femmes dès le matin, ces dernières doivent attendre d’éventuels
désistements à 22h. Une réflexion me semble nécessaire et des
solutions seraient à mon sens envisageables avec un minimum de bon
sens et de concertation pour résoudre ce problème.
Je
comprends également le positionnement de faire de cette halte de
nuit un lieu qui se veut temporaire qui ne doit pas être perçu
comme un logement , cependant je m’interroge sur la légalité
d’interdire de s’alimenter sur un lieu abritant des personnes en
souffrance sur une amplitude pouvant aller jusqu’à plus de 10h.
Ces quelques points sur les conditions d’accueil et sur le
fonctionnement sont autant d’arguments qui m’amènent à
réfléchir et à me positionner personnellement à l’encontre d’un
tel travail.
Sur les conditions
d’intervention :
Au-delà
de l’isolement géographique du site, il est à mon sens d’autres
isolements non moins négligeable perceptibles dans le travail du
quotidien effectué à Rouchy. Je ne souhaite pas m’aventurer à
interroger la terminologie des termes employés pour définir le
public accueilli : familles, hommes, femmes, mineurs… isolés
sur un site qui l’est tout autant. Au-delà de révéler ce que
peuvent vivre les personnes accueillies, il me semblerait plus
approprié dans un tel contexte de parler d’éclatement. Cet
éclatement des personnes accompagnées dans leur parcours par divers
services est, en revanche, intimement lié, à ma lecture, à un
autre isolement tout aussi problématique ; celui du travail
d’accompagnement effectué à Rouchy.
S’agissant
d’une halte de nuit, ce service n’est pas perçu comme une
structure à proprement parlé dans la mesure où l’accueil n’y
est que d’urgence et se veut temporaire. Ainsi, aucun travail sur
la question de projet individualisé ne peut et ne doit y être fait,
ce qui est presque recevable. En revanche, il est regrettable
qu’aucun travail n’ait été effectué quant à l’affichage ou
à la distribution systématique d’un règlement de fonctionnement
intérieur à chaque nouvelle arrivée, comme cela peut se faire dans
nombre d’autres établissements hébergeant du public. Dans un tel
contexte et avec la variété de langues parlées sur le site,
l’explication du fonctionnement y est parfois assez restreinte et
compliquée. Ce manque peut parfois susciter des interprétations et
crées des tensions (notamment entre usagers et agents de sécurité)
entre lesquelles l’isolement du travailleur social s’amplifie.
J’y reviendrais ultérieurement à travers un exemple concret.
Cet
isolement resterait presqu’insignifiant si le travail de
transmission effectué deux fois par jours était réellement relayé
et qu’il puisse y avoir de réels échanges directs entre les
différents intervenants du site Rouchy. Ainsi, il m’est
regrettable de n’avoir eu aucun temps d’échange constructifs (en
réunion par exemple) avec les responsables qu’ils soient de la
DDCS ou de la société APS. Ces temps auraient éventuellement
permis de réajuster certaines pratiques et de pouvoir échanger de
problématiques à tout le moins matérielles et logistiques à
partir d’observations concrètes du terrain. Il n’en a rien été
durant ces 4 mois ce qui conforte cette idée d’isolement. Ce
sentiment d’isolement, est à mon sens, révélateur du souhait de
ne pas chercher à s’adapter aux observations du quotidien mais
bien de rester dans un fonctionnement rigide et mal adapté qu’il
serait pourtant nécessaire de faire évoluer aux réalités du
terrain et au profit d’un minimum d’humanisation de l’accueil.
Gérante
et garante de l’organisation de Rouchy, il m’est difficilement
compréhensible que la DDCS ait une attitude distante d’avec les
professionnels du terrain et qu’elle ne cherche pas à s’inspirer
des remontées qui pourraient être faites. Il n’en demeure pas
moins que ce site isolé semble être volontairement tenu à distance
de quelque regard extérieur que ce soit, voire même d’être un
tabou à ne pas aborder… je n’aborde pas là certains propos
entendus comparant l’isolement et la méconnaissance publique de ce
site à d’autres lieux historiques tristement célèbres. Le
silence et l’isolement qui y règnent seraient-ils volontairement
entretenus ? Pour en avoir échanger de façon informelle sur
des temps de travail avec d’autres professionnels du secteur, il
est une nouvelle fois condamnable qu’un travail de réseau soit
impossible par les professionnels de Rouchy. Cette impossibilité
serait principalement due aux horaires de travail.
La
méconnaissance des conditions d’hébergement de Rouchy, qui
suscite pourtant l’intérêt de nombre de professionnels, est
semble-t-il, entretenue par l’interdiction de pouvoir s’en faire
une opinion en s’y rendant physiquement. Qu’en est-il du travail
des médias et journalistes pour qui il serait probablement porteur
d’en faire une succincte présentation ?... la transparence
n’est semble-t-il pas le maître mot au sujet de ce site. Faut-il y
voir une gêne ou la présence d’un problème éthique ?
Humain ? Juridique ? Je ne l’espère pas.
Le
travail de réseau rendu impossible par les horaires d’intervention
évoqué plus haut me questionne également. Accueillant des
personnes accompagnées ou rencontrées par le SAAS, Espace Accueil,
le PASS, Aide Accueil, le Samu Social,… il est dommageable de
n’avoir aucun temps d’échange formalisé permettant de croiser
les regards des professionnels. J’ai ainsi eu l’occasion de faire
l’expérience de l’intérêt de tels échanges. Ayant travaillé
sur un poste accompagnant les mêmes publics mais sur des missions
différentes, j’ai eu l’occasion de faire des ponts dans les
situations que je pouvais rencontrer à Rouchy. Rompant ainsi
l’isolement du travail effectué sur la halte de nuit grâce à une
autres expérience professionnelle , il me semble important
d’illustrer ce propos par un exemple précis pour bien affirmer la
nécessité de pouvoir échanger avec d’autres acteurs concernés
pour un accompagnement un minimum qualitatif.
Quelques exemples
révélateurs
Ainsi
donc pour illustrer mes différents propos il me faut présentés des
exemples précis mais anonymés volontairement.
Sur le travail isolé :
Concernant
le sentiment d’isolement mais surtout pour défendre l’intérêt
d’activer et de rencontrer les acteurs du réseau, je prends
l’exemple d’une famille kosovarde. N’ayant pas de réelle
connaissances des situations que nous rencontrons à Rouchy, notre
lecture et appréciation de ces situations est, comme tout travail
social, forcément partiel. Cette famille kosovarde, au passé qui
m’était inconnu, fait l’objet d’un échange entre un
professionnel de l’Espace Accueil et moi-même. Ces échanges
abordent brièvement le parcours de cette famille et des violences
vécues. La question de la santé mentale de Mme m’interroge et au
terme de cet échange, il m’est évident que l’hébergement
proposé à cette famille pose un gros souci à Mme dans la mesure où
elle dort dans le même espace qu’une famille albanaise. Mme
exprime se sentir menacée et ne pas dormir chaque nuit. Je décide
alors de changer la famille de dortoir et fais remonter l’information
de la santé de Mme lors de mon compte rendu du soir… il s’avèrera
que le lendemain, Mme sera hospitalisée. Je me pose la question de
savoir si l’échange que j’ai pu avoir avec ce professionnel
d’Espace Accueil n’avait pas eu lieu, que serait devenu cette
situation ? Cet exemple (permis par une autre expérience
professionnelle que Rouchy) me semble parlant quant à l’intérêt
de ne pas travailler en vase clos.
J’abordais
précédemment la notion d’interprétation du règlement, je
n’énumèrerai pas exhaustivement les problèmes vécus pendant
l’accueil des personnes à Rouchy, mais il me faut malgré tout
présenter un exemple parmi d’autres qui me questionne. Je souhaite
ici faire allusion à un point abordé précédemment traitant de
l’interprétation du fonctionnement et des conséquences néfastes
qui s’y rattachent.
Sur la gestion du
fonctionnement
Il
s’agit d’une situation intervenant en matinée et qui aboutira à
ce qui ressemble à mon sens à un abus de d’autorité et un manque
de respect envers le public accueilli. Ainsi un père de famille
russophone et ne comprenant pas le français vient chercher 4 café
et chocolat une matinée de pluie. Il sait qu’il ne peut les
consommer à l’intérieur mais les amène au seuil de la porte de
son dortoir et reste ainsi à l’extérieur du bâtiment. Le vigile
dit qu’il agit ainsi depuis trop longtemps et va régler cette
affaire à sa façon. Il se dirige donc audit dortoir et essaie de
lui rappeler les règles. Servant les cafés j’observe la scène à
distance, et me rend compte que l’agent de sécurité pour bien se
faire comprendre jettera 3 gobelets au sol pour bien signifier son
désaccord. Ce qui ressemblait à une affaire de personnes se
confirme par la tension qui se ressent et par les verbes hauts qui
sont échangées dans les deux langues. L’agent de sécurité,
énervé, revient vers le bureau alors que les échanges continuent à
se faire à distance et toujours sur un ton assez fort qui
interpellent les autres usagers. Je reste spectateur pendant ces
échanges qui prennent une forme de défi verbal malgré
l’incompréhension mutuelle. Alors que le Monsieur revient
également vers le bureau, l’agent de sécurité aura une attitude
agressive en se dirigeant vers lui et en l’insultant à deux
reprises de « pauvre con ». M’étant rapproché du
conflit, j’interviens en constatant que le vigile n’a pas à
rentrer dans ce registre, les deux se séparent. J’aperçois alors
le second vigile (maitre-chien) qui est présent sur le site avec son
chien comme force de dissuasion. La situation tend à s’apaiser
jusqu’à ce que de nouveaux échangent se lancent et incitent le
premier vigile à vouloir en découdre avec l’usager à l’extérieur
de l’enceinte. Ce vigile sort donc du site suivi par Monsieur qui
ne se dégonfle pas, aucun coup ne sera échangé mais cette
situation montre à mon idée une disproportion quant aux attitudes
des travailleurs de sécurité. Partant d’une simple
incompréhension au sujet de cafés, il me semble plus qu’anormal
voire non professionnel de réagir de la sorte. L’agent de sécurité
aura même ce jour-là mais également à d’autres moment le
discours de dire qu’ « ici, c’est moi qui décide,
c’est moi la loi, je fais ce que je veux ».Il aura même dans
l’idée de ne pas lui laisser servir de café le lendemain matin et
il le laissera patienter hors du site le soir même… effectivement
il semble incarner personnellement la loi. Les propos entendus ce
matin-là me semblent inappropriés sur un tel espace et il me semble
assez incohérent qu’une telle attitude reste sans réel recadrage
ou sanction.
Cet
exemple vient donc illustrer le danger d’interprétation du
règlement, tant d’un côté que de l’autre. Au-delà d’une
interprétation, les discours entendus à plusieurs reprises par les
agents de sécurité vont plutôt dans le sens d’une incarnation de
l’autorité du site ce qui me pose des problèmes éthiques
d’autant plus après avoir été témoin notamment de réveils
brutaux ou de discours irrespectueux. De plus, une femme a déjà
verbalisé qu’elle n’avait pas voulu sortir de sa chambre car il
y avait la présence du chien du vigile. La présence de chiens quand
ils sont aux usagers y est autorisé en cage, qu’en est-il des
chiens des vigiles face à la peur que ces animaux peuvent susciter?
Positionnement
personnel
Toutes
ces remarques m’amènent donc aujourd’hui à me questionner et à
me positionner sur mon intervention en tant qu’éducateur à
Rouchy. Je viens de l’aborder, mais je me demande ce que vont
devenir les réveils et les matinées sur le site qui seront laissées
aux mains seules des vigiles. Il me semble chercher à avertir de
dérives dangereuses et tenues secrètes sur ces temps
d’intervention.
Après
ce constat global et plutôt conséquent, j’assume quitter ce poste
dans un positionnement qui est personnel et qui se pose
volontairement à l’encontre d’un fonctionnement qui me semble
indigne. Conscient qu’il n’est pas de la compétence de la DDCS
de gérer le public migrant, il n’en demeure pas moins qu’un
accueil à minima qualitatif et humain serait envisageable sur ce
site et sans pour autant nécessiter de moyens disproportionnés tant
pour les publics en demande d’asile que pour les sans-abris.
Ce
courrier ne permettra peut-être pas de faire évoluer un tant soit
peu le travail effectué à Rouchy, il n’a pas la prétention de
vouloir révolutionner le fonctionnement et les décisions qui sont
prises pour ce site. J’espère néanmoins avoir réussi à alerter
des problématiques qui s’y posent quant à la dignité humaine des
personnes accueillies et avec lesquelles je ne peux pas être en
accord.