vendredi 11 novembre 2011

Suite à la rencontre avec C. Guéant

En réponse aux échos de la rencontre avec M. Guéant et à la promesse d'une meilleure répartition des demandeurs d'asile entre les départements. 
Suite aux articles parus dans la presse régionale (3 et 4 novembre), nous approuvons les propos de Mme Véron (Mairie d'Angers) qui a, lors de sa rencontre avec Mr Guéant, demandé le retour à la compétence pour chaque préfecture en ce qui concerne les conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile. Les élus de gauche ont également insisté sur les moyens nécessaires à une nouvelle répartition des demandeurs d'asile. 
En effet, il ne faut pas oublier la carence persistante de ces conditions d'accueil de la part des autorités compétentes. D'ailleurs, les différentes réquisitions depuis la gendarmerie des Ponts de Cé fin 2008 soulignaient bien les manquements évidents des autorités et les réquisitions avaient pour objectif principal de pallier à ces carences. 
Mieux répartir le flux des demandeurs d'asile ! Qui peut s'opposer à cela ? Cependant, pour que cela fonctionne et soit pertinent, il faut, qu'au-delà de la répartition géographique et administrative des personnes, les moyens adéquats soient mis en place. Notamment des moyens humains en termes d'accompagnement administratif, social et juridique. 
Contrairement à Monsieur Béchu - pour qui la question des moyens associés à la répartition des demandeurs d'asile n'est pas son problème – nous pensons que l'accompagnement est bel et bien l'enjeu principal d'un véritable accueil des demandeurs d'asile. Peut-on accepter l'idée d'une répartition qui ne serait pas associée à un accompagnement réel, réalisé par des personnes compétentes, capables de faire respecter le droit d'asile dans toutes ses dimensions ?     
Cela suppose trois conditions indispensables : 
- Que le gouvernement assume pleinement l'accompagnement social, administratif et juridique de ces demandeurs d'asile comme l'y oblige le droit tant européen que français, en rétablissant conventionnellement les plateformes d'accueil de ces départements dans leur délégation de service public tel que prévu par les textes et qu'exige le respect de la dignité humaine. 
- Qu'une véritable politique d'accueil soit mise en oeuvre avec les moyens matériels et humains adaptés au besoins tels que prévus dans la directive "accueil" 2003/9 du Conseil de l'Union européenne. 
- Que ces mesures de bon sens soient généralisées à tout le territoire. 
La politique adoptée par la préfecture de la région Bretagne montre l'absurdité du système comme l'illustre le récit d'un membre de notre réseau des collectifs Grand Ouest. 
« Il s'agit de deux dames, deux soeurs dont l'aînée est handicapée par un problème de hanche qui la fait beaucoup souffrir. Elle a été hospitalisée aux urgences qui lui ont donnée un calmant mais n'ont pas mis en place le suivi dont elle avait besoin dans la mesure où cette dame n'avait pas la CMU (Couverture Mutuelle Universelle). Je la rencontre l'autre jour avec une traductrice, elle me raconte : - Quand elles se sont présentées au SAO, on leur a refusé de rester à Rennes et on les a envoyées à Vannes. 
- Elles sont allées à Vannes où elles ont établi une domiciliation. Mais elle se sont retrouvées à la rue. Rendez-vous à la préfecture prévu à la mi-octobre. 
- Elles sont revenues à Rennes pour se rapprocher de leur communauté, et ont atterri dans une réquisition du Dal. 
- Elles se retrouvent à Rennes avec une domiciliation à Vannes, donc impossible d'ouvrir les droits CMU, d'avoir une carte de bus, une prise en charge caritative... Mais difficile de les renvoyer à Vannes puisqu'ici elles ont trouvé un toit et une communauté ! 
- Elle me dit qu'elle souffre, qu'elle a besoin de soins... Je leur conseille d'aller à Vannes ouvrir les droits CMU, et de revenir ici si elles n'ont pas d'hébergement à Vannes. 
- Un compatriote les emmène en voiture à Vannes. Elles se présentent à ce qu'elles croient être le SAO Vannetais, mais qui est l'association habilitée pour les domiciliations. 
- Un membre de l'association m'appelle et m'explique qu'elle ne sait pas quoi faire de ces dames, qu'on leur a demandé de faire des domiciliations, mais sans leur donner les moyens en terme d'hébergement, qu'il y a déjà une famille à la rue ( je lui explique qu'à Rennes il y en a des dizaines) et ni en termes de personnel pour le suivi des personnes. Elle me dit qu'elle explique – pas officiellement bien sûr - aux gens que s'ils restent à Vannes ils seront à la rue ; alors s'ils peuvent retourner à Rennes chercher un soutien auprès de leurs compatriotes... 
- Je lui explique le besoin de CMU, elle me dit qu'à Vannes ce n'est pas possible, qu'il faut d'abord aller à la préfecture. (A Rennes ce n'est pas le cas, les droits sont ouverts dès qu'ils ont leur convocation.) 
- Le lendemain, c'est l'AS de l'hôpital de Vannes qui m'appelle : elle va ouvrir les droits CMU. Pas de reproche à la dame d'hier : elle ne sait pas, elle n'est pas formée à l'accueil des Demandeurs d'Asile, ce n'est pas son métier ! 
- Un bénévole leur a trouvé un hébergement pour une nuit. Ensuite ? Si elles se retrouvent à la rue, elles reviendront sans doute à Rennes. Comment le leur reprocher ? Avec la CMU mais toujours sans un sou, sans carte de bus, sans resto du coeur ni secours pop. Et ce, jusqu'au 15 octobre où elles iront à la préfecture. Après, quand elles auront reçu leur enregistrement à l'OFPRA, elles auront droit à un hébergement à Vannes. Elles auront droit... mais il n'y aura pas de place ! » 
Ce récit montre bien à quel point cette idée de répartition dans les différents départements risque bel et bien d'aboutir à un effet d'annonce purement et simplement mais ne résoudra en rien la question fondamentale qui est le respect de droit d'asile. 
Si ces conditions minimales ne sont pas remplies, l'argent public continuera d'être gaspillé dans des nuitées d'hôtel, au détriment des demandeurs d'asile mais aussi des populations françaises sans logis avec toutes les frictions communautaires que cela peut engendrer. La seule différence sera la dispersion sur toute la région de situations dramatiques concentrée pour l'instant sur Nantes et Angers. 
Quant à la demande de suppression temporaire des bornes d'enregistrement des demandes d'asile émise par Mr Béchu, elle relève plus du "pragmatisme" de bureau que du réalisme de terrain. Son souhait : vouloir dissuader les éventuels futurs arrivants en limitant autant que possible les possibilités d'enregistrement et d'accueil. Rien de très surprenant. Que le Président du Conseil général commence par respecter ses obligations légales au titre de l'Aide à l'Enfance... et se mettre en conformité avec la Convention Internationale des Droits de l'Enfant. 
Par ailleurs, le Collectif désapprouve totalement la présence des demandeurs d'asile dans les associations caritatives. Ils doivent faire l'objet d'une prise en charge spécifique avec des moyens spécifiques mis en place par l'Etat. Les Demandeurs d'asile n'ont rien à faire à quémander pour manger, pour se doucher... Cela éviterait sans doute la multiplication des tensions entre eux et les populations françaises qui finissent par ne plus accepter la présence de ces étrangers alors que ce sont bel et bien des compagnons de misère. 
Il est facile, pour les autorités compétentes, de se retrancher derrière ces simulacres pour donner l'impression d'être débordés et de ne pouvoir faire face alors qu'en réalité les structures sont saturées parce que les demandeurs d'asile n'ont rien à y faire et n'ont pas à être orientés vers ces lieux. Comme vous le voyez il reste beaucoup à faire pour que les droits les plus élémentaires soient respectés. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire