Au Parti socialiste, un
zeste de xénophobie ?
Personne ne s’est bercé
d’illusions sur ce que l’élection de François Hollande et d’une
majorité législative de centre gauche allait entraîner dans le
domaine de la politique migratoire et du traitement des étrangers en
France : nulle révolution à prévoir, pas même une réflexion de
fond sur des perspectives de réforme à long terme. Mais ce
classicisme conservateur n’interdisait pas d’espérer et même
d’attendre une attitude moins brutale que celle des dirigeants
précédents qui avaient délibérément érigé cette brutalité en
vertu.
Or, le gouvernement
actuel multiplie les brutalités tandis que, sauf à la marge, sa
majorité n’exprime aucun état d’âme. Quant au Parti
socialiste, il a même offert, lors de son université d’été
d’avril 2012, une standing ovation remarquée au ministre de
l’Intérieur venu y tenir un discours dit de fermeté. Fort de ce
soutien enthousiaste, Manuel Valls peut en toute tranquillité
s’affirmer l’héritier direct de Nicolas Sarkozy : comme de son
temps, déploiements de force contre les Roms, maintien de 30 000
régularisations par an, annonce de la multiplication des expulsions.
Même en matière d’activité policière, dont la gauche défendait
jusqu’alors l’encadrement, le gouvernement ne veut plus de
dispositif permettant de réduire les contrôles d’identité
discriminatoires. Au lieu de profiter de l’invalidation de la garde
à vue relative aux étrangers en situation irrégulière par la Cour
de cassation pour instaurer un dispositif plus respectueux de leurs
droits, il a mis en place une « retenue » qui comporte moins de
garanties encore.
Même dans le domaine de
l’intégration des étrangers en situation régulière, François
Hollande, ses ministres et sa majorité ne font rien : la promesse du
droit de vote est oubliée ; la facilitation de la naturalisation
relève du trompe-l’œil.
Pour les sans-papiers,
c’est la catastrophe. Eux attendaient évidemment beaucoup d’un
changement de majorité. Il est normal que leur désillusion les
conduise au désespoir et que ce désespoir puisse les entraîner à
la révolte, comme à Lille où une quarantaine d’entre eux vient
d’arrêter une grève de la faim commencée il y a plus de deux
mois. Là encore, le gouvernement a délibérément opté pour une
brutalité ostentatoire en expulsant deux d’entre eux le 31
décembre, y ajoutant, pour faire bonne
mesure en ce jour de
fête, un jeune Pakistanais en France depuis l’âge de 15 ans.
Comment s’expliquer
cette surenchère dans la maltraitance des étrangers, qui va très
au-delà du comportement habituel des responsables situés au centre
de l’échiquier politique ? À n’en pas douter, le président de
la République et son gouvernement espèrent séduire l’opinion par
leur fermeté à l’encontre des étrangers faute de lui apporter
satisfaction par des mesures favorables en matière sociale,
économique ou fiscale. Les étrangers lui servent de monnaie
d’échange à la faveur d’une sorte de prise d’otages
politicienne qui ne s’embarrasse ni des droits fondamentaux, ni de
l’égalité entre les êtres humains, ni de la simple décence. De
cette brutalité émane un discours politique implicite qui murmure
aux Français que le pouvoir les protège malgré tout de l’adversité
puisqu’il frappe les étrangers.
Devenir xénophobe pour
essayer d’être populaire, tel est désormais le programme,
exactement comme celui de Sarkozy en campagne. Le discours de
Grenoble
érigé en philosophie de l’État, quels que soient ceux qui le
dirigent. La dérive des responsables politiques de la France devient
aussi dangereuse qu’abjecte.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire